Entre 1997 et 1998 le parlement vote des lois successives en faveur de la protection et un droit au séjour pour les personnes étrangères gravement malades. L’évaluation est alors confiée aux médecins de la Direction départementale des affaires sociales (DDAS) puis ensuite à l’Agence régionale de santé (ARS). Plus récemment en 2016 une loi relative au droit des étrangers a confié aux médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) la mission de mener une évaluation médicale des étrangers malades et d’indiquer aux préfets si la demande de la personne est recevable. La réforme comporte en outre un volet procédural contraignant visant à lutter contre les possibilités de fraude à l’identité.

Un premier rapport d’activité annuel de l’OFII relatif à cette nouvelle mission a été présenté au parlement fin 2018. Après une année d’exercice sur les 27 000 dossiers traités (40 000 enregistrés), les chiffres publiés font état d’une baisse importante des avis favorables qui s’élevaient à 53% en 2017 contre 70% environ précédemment selon les années et les régions (la donnée nationale disponible la plus récente date de 2014, où le taux était alors de 77%). Cette baisse significative est justifiée selon l’OFII par une amélioration de l’information médicale, de la qualité de l’évaluation, et d’une homogénéisation de décisions argumentées par des « fiches pays » sur l’accessibilité des soins dans le pays d’origine. Cette donnée ne peut cependant manquer d’interroger sur la prise en compte par l’OFII de la singularité des situations médicales, de la précarité propre aux étrangers malades, ou encore des difficultés d’accès aux soins. Elle fait par ailleurs écho aux inquiétudes exprimée par le Défenseur des droits, dans un rapport sur les droits fondamentaux des étrangers en France publié en 2016, craignant que le transfert de compétence aux médecins de l’OFII amène à « faire primer des considérations liées à la maîtrise de l’immigration sur celles liées à la protection de la santé ».

Dans le détail, les disparités s’accentuent avec un différentiel portant surtout sur les pathologies psychiatriques. En 2017, 10 041 demandeurs avaient une telle pathologie, soit 27,4% de l’ensemble des demandeurs. Pour près de la moitié (48%) il s’agissait de troubles névrotiques (principalement état de stress post-traumatique). Pour l’ensemble des pathologies psychiatriques, seuls 26,5% des avis ont été favorables soit moitié moins que la moyenne générale. Cette situation spécifique en matière de santé mentale pourrait s’expliquer par des a priori théoriques, la faiblesse de l’expertise clinique ou la méconnaissance du travail thérapeutique dans ce domaine.