Eurostat a publié ses données sur les décisions relatives aux demandes d’asile en UE. Il est important de noter que les données publiées dans le communiqué de presse de l’Agence européenne portent sur une Union européenne (UE) à 27 Etats membres. Elles n’incluent pas les décisions rendues au Royaume-Uni ni les décisions sur les demandes d’asile de ressortissants britanniques. Cet article traite des données au sens d’une UE à 28 Etats membres puisque le Royaume-Uni a officiellement quitté l’UE le 31 janvier 2020. Elles sont issues des données en ligne de l’agence européenne.

Les 28 Etats membres ont rendu un total de 569 260 décisions de première instance et 308 775 décisions « définitives » (décisions en appel). Sur ces décisions, 321 735 ont accordé une protection, dont 221 015 en première instance et 100 720 après un recours. Le nombre global de décisions positives est en légère baisse par rapport à 2018 (333 355 décisions positives). Le taux de protection global en 2019 est de 56,5% (57% en 2018), le taux de protection en première instance de 39% (37% en 2018) et le taux de protection en appel de 33% (36% en 2018). Parmi l’ensemble des personnes ayant obtenu un statut de protection, 162 870 ont un statut de réfugié, 84 085 ont une protection subsidiaire, et 74 780 ont une protection pour raisons humanitaires.

L’Allemagne est le pays ayant rendu le plus grand nombre de décisions positives (116 225), suivie de  la France avec 42 120, de l’Espagne avec 38 525, et de l’Italie avec 31 010. Ces quatre pays représentent 77% des décisions positives. Dans la suite du classement, on retrouve le Royaume-Uni avec 25 950, la Grèce avec 18 595, l’Autriche avec 13 730, et la Suède avec 11 765. En bas, figurent la Slovaquie (40), l’Estonie (45), la Lettonie (55), la Hongrie (60), la Croatie (60). Mis en perspective avec la population nationale, la Grèce est en tête avec 1 734 décisions positives par million d’habitant, suivie de l’Autriche avec 1 550, puis Chypre avec 1 501, l’Allemagne (1400), la Suède (1 150), le Luxembourg (1091) et Malte (881). La France figure à la neuvième place avec 629 décisions positives par million d’habitants, contre 620 en 2018 (11ème places). En bas du classement, on retrouve la Hongrie (6), la Pologne (7), la Slovaquie (7), la République tchèque (15), la Croatie (15), et le Portugal (17).

Les principaux bénéficiaires d’une protection dans l’UE restent les Syriens qui représentent 25% des décisions positives avec 79 415 accords, suivis des Afghans (13%), des Vénézuéliens (12%), des Irakiens (7%), des Iraniens et des Erythréens (4%), des Turcs, des Somaliens, des Nigérians (3%), et des Pakistanais (2%). C’est la première année que les Vénézuéliens sont dans les trois premiers pays d’origine des décisions positives De plus, la proportion des Syriens continue de diminuer puisqu’elle était de 32% en 2017 et 29% en 2018, tout comme les Afghans avec 19% en 2017 et 16% en 2018. Les Irakiens se stabilisent à 7% depuis 2018. Les trois premières nationalités ayant obtenu une protection dans chaque Etat membre sont relativement variables. La Syrie est le premier pays dans 11 Etats membres. On retrouve également dans le classement d’autres pays d’origine tels que le Zimbabwe en Irlande, le Tadjikistan en Lituanie, la Russie en Pologne, le Soudan en France, la Libye à Malte, l’Ukraine au Portugal, et la Palestine à Chypre. Il est à souligner que les apatrides représentent la troisième catégorie, à défaut de nationalité, des personnes ayant obtenu une protection.  Le taux de protection en première instance est supérieur à 50% pour le Venezuela (96%), la Syrie (85%), l’Erythrée (82%), l’Afghanistan (54%), la Turquie (53%), la Somalie (50%). En dessous de 15%, on retrouve le Nigéria (16%), le Pakistan (12%) ou encore l’Albanie (7%).

De l’Espagne avec 66% à la Hongrie avec 8%, le taux de protection en première instance est très variable d’un Etat membre à un autre, avec une moyenne européenne de 39% contre 37% en 2018. En tête de classement on retrouve également le Luxembourg (57%), l’Autriche (53%), la Grèce (53%), le Royaume-Uni (53%), l’Irlande (52%), l’Allemagne (46%). Le taux de protection en première instance de la France est de 25%, suivie par la Lettonie (23%), le Portugal (23%), l’Italie (20%), et la Croatie (17%). Certaines variations importantes sont à souligner en Espagne qui passe de 24% à 66%, au Royaume-Uni en hausse de 31% à 53%, mais aussi au Danemark de 33% à 52%, en Allemagne de 37 à 46%, en Estonie de 25% à 50%, et en Italie de 11% à 20%. Pour d’autres Etats, on observe une baisse importante notamment au Luxembourg de 72% à 57%, en Belgique de 51% à 38%, en Finlande de 49% à 34%, en Lituanie de 50% à 28%, au Portugal de 60% à 23%, en Croatie de 31% à 17%, et en Hongrie de 36% à 6%. La comparaison des taux d’accord ne permet pas à elle seule d’analyser la qualité d’un système d’asile, les réponses apportées par les instances nationales étant liées aux situations individuelles qui leur sont soumises, variables selon les États.

Les variations observables au regard de la nationalité des demandeurs d’asile constituent un indicateur plus intéressant pour illustrer le manque d’harmonisation des politiques d’asile. Pour les Afghans, il passe de 0% en Croatie, en Lettonie, en République tchèque, à 25% au Pays-Bas, 33% en Finlande, 63% en France, 76% en Espagne, 80% en Slovaquie, et 100% au Portugal. De même pour les Vénézuéliens, il est de 0% au Danemark, à Malte, en Grèce, au Portugal mais de 28% en Belgique, 44% en Allemagne, 71% en Irlande et 99% en Espagne. Pour les Albanais, d’une moyenne de 7% au niveau européen, il est de1% en Allemagne, de 7% en France, 18% en Autriche, et de 24% au Royaume-Uni.

Le statut de réfugié au sens de la Convention de Genève représente 51% des décisions positives accordées, 26% sont des protections subsidiaires et 23% des statuts de protection pour raisons humanitaires. Alors que la part des statuts de réfugiés augmente légèrement de 49 à 51%, les protections subsidiaires diminuent de 30 à 23% pour laisser place à une hausse des protections humanitaire de 21 à 23%. C’est la quatrième année consécutive que cette dernière part augmente. C’est un statut particulièrement utilisé en Allemagne, malgré une baisse de 21%, en Espagne qui enregistrement un pic avec 35 335 statuts contre 1 540 en 2018, en Italie avec 9 285 en légère baisse, et en Suède avec 3 975 en légère hausse.

Le nombre de décisions rendues en appel est stable à 308 775, alors qu’il était en hausse important depuis 2015. Le nombre de décisions positives en appel est en baisse passant de 117 935 en 2018 à 100 720. C’est également un changement de dynamique après une hausse constante depuis 2016. Le taux de protection est en légère baisse de 36% à 33%.

Eurostat a publié également des données sur les réfugiés réinstallés en 2019. 26 855 réfugiés ont été réinstallés dans les 28 Etats membres (21 245 dans les 27 Etats membres). Le Royaume-Uni est le premier pays de réinstallation au niveau européen avec 5 610 réfugiés réinstallé, suivi de près par la France avec 5 600, puis la Suède (4 955), l’Allemagne (4 890), les Pays-Bas (1875), l’Italie (1 355), la Finlande (890), l’Italie (785), le Portugal (375), et la Belgique (240). Plusieurs pays n’ont réinstallé aucun réfugié : la République tchèque, le Danemark, la Grèce, la Lettonie, la Hongrie, Malte, l’Autriche, la Pologne, la Slovénie, la Slovaquie. Les données ne sont pas disponibles pour la Lituanie, Chypre, et l’Espagne.

La collecte des données relatives aux demandes d’asile et aux décisions est encadrée par le règlement (CE) n° 862/2007 relatif aux statistiques communautaires sur la migration et la protection internationale. Plusieurs lacunes peuvent être notées sur la collecte des données concernant les décisions sur les demandes d’asile. Les États membres fournissent des données sur des décisions négatives sans différencier les décisions basées sur le mérite et sur l’admissibilité, ou les décisions prises dans le cadre d’une procédure normale ou accélérée. Les décisions basées sur l’admissibilité telles que celles relatives au concept de « pays tiers sûrs » sont comptés comme des décisions de rejet. Cette approche tend à confondre les motifs de rejet de décisions et fausse les données des autorités nationales d’asile et leur taux de protection.

 

 

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Photo d'illustration : © EU/ECHO