Ce mercredi 10 avril, le Pacte sur la migration et l’asile est soumis au vote des députés européens : s’ils sont adoptés, ces textes entraineront une forte dégradation des conditions d’accueil des demandeurs d’asile partout en Europe, et particulièrement aux frontières.

Le Pacte sur la migration et l’asile, proposé par la Commission européenne en juillet 2020, et composé de plusieurs règlements et directives, vise à réformer le système européen d’asile et de migration. Le Parlement européen s’apprête à voter cinq règlements déterminants, dans une fuite en avant qui menace fortement les droits des personnes étrangères et les systèmes d’accueil et d’asile.

Si les objectifs affichés du Pacte étaient de remédier aux faiblesses du système actuel, qui a échoué à organiser la solidarité européenne, et a maintenu les demandeurs d’asile dans des situations de grande précarité, ses conséquences risquent d’être à l’exact opposé du but recherché. Les mesures sur lesquelles le Parlement doit aujourd’hui se prononcer renforcent les logiques qui ont conduit aux écueils d’une politique de gestion de la migration et de l’asile qui n’est ni solidaire, ni coordonnée, ni respectueuse des droits fondamentaux des personnes.

Parmi ces textes, les règlements « filtrage » et « procédures » organisent la privation de liberté à grande échelle des personnes arrivants sur le territoire européen, y compris les familles avec enfants ou les personnes vulnérables. Or aujourd’hui, les centres de rétention aux frontières sont déjà surpeuplés et les personnes y vivent dans des conditions indignes qui mettent en péril leur sécurité, et leur santé physique et mentale. Ces règlements permettent aussi un examen expéditif des demandes d’asile, qui fait craindre une augmentation significative des violations des droits des demandeurs. L’objectif d’éloignement rapide de ces personnes en cas de refus de leur demande d’asile qui prétend justifier la rétention à grande échelle est une fiction en complet décalage avec la réalité de l’éloignement en Europe, et risque seulement de conduire à des périodes d’enfermement prolongées et inutiles.

Le Pacte avait pour objectif de réformer le règlement « Dublin » et de mettre en œuvre une réelle solidarité avec les pays de première entrée. Pourtant, en organisant une solidarité « à la carte », entendue tant comme l’accueil de personnes relocalisées que le financement de procédures d’éloignement ou de projets dans des pays tiers, le règlement « gestion de la migration et de l’asile » dévoie les concepts de solidarité et de partage des responsabilités entre Etats membres. La responsabilité des Etats membres situés aux frontières de l’UE en sort renforcée, tout comme l’externalisation de la politique migratoire, à travers laquelle l’UE délègue la gestion de ses frontières à des pays tiers dans lesquelles les personnes migrantes sont victimes de graves violences.

Loin d’offrir une meilleure harmonisation des règles en vigueur dans les différents Etats européens, le Pacte introduit de nouvelles dérogations. En particulier, le règlement « crise et instrumentalisation » prévoit que des règles plus défavorables aux demandeurs d’asile puissent être appliquées, comme la prolongation de la rétention ou l’application de la procédure d’asile à la frontière à de plus nombreuses personnes. La consécration de ces régimes d’exceptions aux contours flous ne peut que renforcer les inquiétudes soulevées par l’ensemble du Pacte sur les conditions futures de l’exercice du droit d’asile en Europe.

Loin de l’espoir de voir émerger une réforme du système européen d’asile et de migration fondée sur le respect des droits des personnes, la responsabilité et la solidarité, le Pacte européen sur la migration et l’asile risque à l’inverse d’aggraver les failles du système actuel. Nous appelons par conséquent les députés européens à voter contre l’ensemble des cinq règlements. Les travaux doivent se poursuivre pour changer radicalement de cap et parvenir demain à une politique migratoire européenne responsable, solidaire, et respectueuse des personnes et de leurs droits.

Contacts presse :

  • France terre d’asile : Yohan Cambet-Petit-Jean, responsable communication,
    07 63 57 72 73
  • Forum Réfugiés : Mathias Skubich, responsable communication, 06 01 64 51 34

 

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