Dans le monde, un nouveau record de déplacements forcés

Le premier chapitre du rapport présente tout d’abord un panorama statistique des déplacements forcés dans le monde, et indique que près de 110 millions de personnes vivent en dehors de leur lieu de résidence pour fuir des guerres, des persécutions, des violences ou des évènements climatiques, un chiffre sans précédent.

Le panorama statistique est fortement impacté par la guerre en Ukraine, devenue le premier pays d’origine des réfugiés dans le monde en 2022 avec plus de 8 millions de personnes enregistrées principalement dans l’Union européenne et en Russie. Le Venezuela (6 millions de réfugiés) et la Syrie (5,3 millions) viennent ensuite. La Turquie demeure le principal pays d’accueil des réfugiés dans le monde (3,6 millions de personnes recensées, principalement de nationalité syrienne). Les besoins de réinstallation sont au plus haut (1,47 millio de personnes recensées par le HCR) mais ne sont couvert qu’à hauteur de 4% (58 457 réinstallations en 2022). Par ailleurs, à la fin de l’année 2022, le nombre de personnes en situation de déplacement interne est estimé à 71 millions, soit une hausse de 20% par rapport à 2021. Enfin, le nombre d’apatrides demeure stable (4,3 millions de personnes dans le monde).

Plusieurs articles thématiques analysent ensuite la situation géopolitique dans quelques pays et régions d’origine des réfugiés : Soudan (contribution de Marc Lavergne, géopolitologue), République démocratique du Congo, Ukraine, Afghanistan (contribution de Nassim Majidi et Cyrus Ettehadieh, chercheurs au centre Samuel Hall). Une contribution d’Alexandra Castro, chercheuse sur les questions migratoires, met en perspective le dispositif européen de protection temporaire avec d’autres systèmes identiques appliqués à d’autres régions du monde.

En Europe, une politique commune incertaine dans un contexte de hausse de la demande d’asile

Le deuxième chapitre du rapport fait le bilan de la demande d’asile et de la protection des réfugiés en Europe. Un panorama statistique précise d’abord que la demande d’asile est au plus haut niveau depuis 2016 (881 220 premières demandes, +64% par rapport à 2021) tandis que le nombre total de personnes protégées (384 245, +40% par rapport à 2021) comme le niveau global de protection (61%, +9 pts par rapport à 2021) connaissent une hausse significative (52% en 2021 contre 54% en 2020). La Syrie, en tête depuis 2013, l’Afghanistan et le Venezuela (avec une spécificité espagnole dans l’approche de cette demande d’asile, décrite dans l’ouvrage), sont les principaux pays d’origine des demandeurs d’asile mais aussi des personnes protégées en 2022 dans l’Union européenne.

Concernant l’accès au territoire européen, le rapport rappelle que l’année 2022 a été marquée par la persistance de pratiques de refoulement largement documentées aux frontières, tandis que des violations importantes des droits fondamentaux par l’agence européenne Frontex ont fait l’objet d’enquêtes officielles. Sur les sauvetages en mer, l’Union européenne demeure impuissante pour encadrer les pratiques parfois illégales des États membres et proposer un dispositif adéquat. Le rapport propose des focus sur l’évolution de la situation en Italie, avec l’élection d’un nouveau gouvernement aux orientations politiques inquiétantes, en Espagne où l’accès à l’asile demeure quasiment impossible dans les enclaves de Ceuta et Melila, et en Grèce où les conditions d’accueil sont toujours problématiques.

Le rapport analyse ensuite la mise en œuvre du régime d’asile européen commun. Les auteurs indiquent que de nombreux États membres peinent à assurer une application convenable du droit d’asile. Une contribution de l’ONG Vluchtelingenwerk Vlaanderen apporte notamment un éclairage sur la crise de l’accueil en Belgique. Le rapport dresse ensuite un état des lieux des dispositifs de relocalisation mis en place depuis 2015 et souligne l’opacité autour du dernier mécanisme en date adopté en juin 2022. Après un point d’étape sur les négociations autour du Pacte sur la migration et l’asile, les enjeux liés à la politique extérieure de l’UE en matière d’asile sont évoqués. Comme chaque année, ce chapitre comporte une sélection de jurisprudences européennes relatives à l’asile. Il se termine par une analyse de la protection temporaire des réfugiés d’Ukraine à l’échelle européenne.

En France, un nombre record de personnes protégées malgré des conditions d’accueil dégradées pour les demandeurs d’asile

Le troisième chapitre du rapport concerne l’exercice du droit d’asile en France, et analyse le traitement des demandeurs à chaque étape du parcours d’asile.

Concernant d’abord l’entrée dans la procédure, le rapport souligne les difficultés persistantes pour accéder à la demande d’asile aux frontières franco-italiennes et franco-espagnoles. Il propose ensuite un bilan de l’accueil du navire de sauvetage Ocean Viking à Toulon en novembre 2022, soulignant un décalage entre les annonces politiques et les réalités juridiques et opérationnelles.

Une analyse statistique de l’état de la demande d’asile en France en 2022 montre une hausse de 31% des premières demandes en préfecture (137 000) par rapport à 2021, et un nombre total de demandes (168 699) à niveau record. Concernant la mise en œuvre du règlement Dublin, le taux de transfert en 2022 (7%) est au plus bas depuis 2017. Le rapport analyse ensuite l’activité de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) au cours de l’année 2022, avec un nombre record (131 254) de premières demandes. Pour la 5ème année consécutive, les Afghans sont les plus nombreux à demander l’asile en France.

Concernant l’instruction des demandes d’asile, le rapport indique que plus de 56 000 personnes ont été protégées en 2022, un niveau jamais atteint. Le taux d’accord à l’OFPRA atteint 29% tandis que le taux global incluant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) s’établit à 42%. La part des protections subsidiaires dans les accords est au plus bas depuis 2015, laissant une place plus importante au statut de réfugié. Dans l’ensemble, le délai d’instruction des demandes a diminué de quatre mois en 2022 pour s’établir à un peu moins d’un an si l’on s’en tient aux délais constatés à l’OFPRA et à la CNDA. Une sélection de jurisprudences françaises relatives à l’asile est proposée pour conclure cette partie sur l’instruction des demandes d’asile.

L’accueil des demandeurs d’asile demeure compliqué, avec même une aggravation dans certains domaines. Le parc d’hébergement pour demandeurs d’asile n’a pas évolué en 2022, les créations de places envisagées étant dépendante du non dépassement du budget de l’allocation pour demandeurs d’asile (dépassé du fait de l’arrivée des réfugiés d’Ukraine bénéficiaires de cette allocation). 103 914 places pour demandeurs d’asile étaient financées au sein du dispositif national d’accueil (DNA) fin 2022, mais une partie importante des places étaient non ouvertes, non disponibles, vacantes ou occupées par des réfugiés et des déboutés (en présence autorisées ou indue) : les demandeurs d’asile n’occupaient ainsi que 56% des places dédiées au sein du DNA. La couverture des besoins demeure donc insuffisante, seuls 41% des personnes dont la demande d’asile était en cours fin 2022 étaient hébergées à cette date, un taux qui monte à 58% si l’on ne prend en compte que les personnes éligibles aux conditions matérielles d’accueil (CMA). Une tendance forte se confirme en effet cette année : de plus en plus de demandeurs d’asile ne disposent d’aucune aide matérielle, du fait d’une application stricte des dispositions légales permettant le refus ou le retrait des CMA. La mise en œuvre du schéma national d’accueil, si elle a permis un desserrement de l’Île de France grâce à l’orientation effective de 30 402 personnes vers d’autres régions en 2021 et 2022, a également participé à la précarisation des demandeurs d’asile qui se voient priver des CMA lorsqu’ils refusent de rejoindre la région désignée. Le schéma national continue par ailleurs à renforcer la saturation des places au niveau local (départemental et régional) et diminue ainsi les possibilités d’orientation vers l’hébergement à cette échelle.

Le rapport évoque ensuite les enjeux liés à l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale. Après avoir dressé un état des lieux des différents dispositifs d’intégration, notamment les centres provisoires d’hébergement (CPH) et le nouveau programme AGIR, l’ouvrage évoque un frein important qui s’est accentué en 2022 : la délivrance des actes d’état civil par l’OFPRA et des titres de séjour par les préfectures. À l’OFPRA, le délai pour cette étape finale du parcours est passé de 8 mois à plus de 10 mois. Parallèlement, plusieurs démarches auparavant menées auprès des préfectures doivent être désormais formulées sur un portail dématérialisé intitulé «  administration numérique pour les étrangers en France » (ANEF) sur lequel les réfugiés sont confrontés à de nombreuses difficultés techniques ou réglementaires qui freinent également l’intégration. Concernant la réinstallation, la France a atteint son objectif pour 2022 avec 3 316 personnes réinstallées dont 3 047 au titre de l’engagement formulé à l’échelle européenne (engagement de 3 000 en 2022, renouvelé pour 2023).

La dernière partie du rapport porte sur la protection temporaire des réfugiés d’Ukraine. Elle dresse un bilan statistique dans plusieurs domaines liés à l’accueil exceptionnel mis en place par les autorités, étudie l’évolution du dispositif d’hébergement et analyse les enjeux liés à l’intégration à moyen et long terme de ces personnes dans un contexte d'avenir incertain.

 

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