Deux tiers du territoire de la République centrafricaine (RCA) sont abandonnés par un Etat impuissant et cela au profit de groupes armés, qui exploitent les richesses locales et soumettent les populations à des violences et des extorsions d’argent. Ces groupes rebellent génèrent des revenus importants en taxant illégalement les populations locales, en faisant du trafic d'or, de diamants et d’autres minerais. Les différentes factions issues de la coalition Séleka ou des anti-balakas (voir le dossier Ritimo de 2017 sur la guerre civile en RCA), se font et se défont au gré des opportunités et des tensions ethniques, et se livrent à des combats qui font des centaines de victimes parmi les populations locales. En février 2019, un accord de paix avait pourtant été signé entre des représentants de 14 groupes armés et le gouvernement à Bangui. L’espoir de stabilisation et d’union nationale s’est vite éteint.

L’organisation Human Rights Watch (HRW) fait état dans son rapport annuel de combats entre factions du Front populaire pour la renaissance de la République centrafricaine (FPRC) dans les villes de Bria en janvier 2020 et Ndele en avril 2020, qui ont tué des dizaines de civils. Les combats entre le FPRC et le Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ) à Birao en janvier, février et mars 2020 ont par ailleurs tué des dizaines de combattants, mais aussi des civils. Depuis décembre 2020 une coalition d’opposants (Coalition des patriotes pour le changement, PCC) a brisé l’accord de paix et met la pression sur le gouvernement. Suite aux élections du 27 décembre 2020, Touadéra a été déclaré vainqueur mais la coalition d’opposition dénonce des fraudes et conteste la victoire. Sur tout le territoire centrafricain, des groupes armés mènent des attaques sporadiques et parfois violentes, surtout dans l’ouest du pays. Ils ont envahis la ville de Bouar, 5ème plus grande ville du pays, avec 40 000 habitants, proche de la frontière avec le Cameroun. En prenant le contrôle du corridor Garoua-Boulaï-Bangui, un des axes principaux entre la Centrafrique et le Cameroun voisin où 80 % des marchandises importées transitent, ils privent la capitale Bangui de denrées alimentaires de base. Deux attaques simultanées d'environ 200 assaillants ont été repoussées le 13 janvier 2021 à Bangui par les forces armées centrafricaines.

Les civils sont les premières victimes des tensions et des violences qui perdurent dans plusieurs régions de la Centrafrique. Mais le pays est également l’un des contextes les plus dangereux pour les travailleurs humanitaires. Entre janvier et décembre 2020, 424 incidents contre des humanitaires en RCA ont été enregistrés contre 306 en 2019, selon les Nations unies.

D’après le rapport précité de HRW, près d’un quart de la population centrafricaine (4,7 millions) était déraciné à la fin 2020, avec plus de 600 000 réfugiés dans les pays voisins et autant de déplacés à l’intérieur de la RCA. Depuis l'offensive rebelle de décembre, plus de 90 000 personnes ont fui vers des pays voisins tandis que des dizaines d’autres milliers sont déplacés à l’intérieur du pays, selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Le HCR indiquait le 8 janvier 2021 que plus de 30 000 Centrafricains se sont réfugiés au Cameroun, au Tchad, en République démocratique du Congo (RDC) et au Congo.

Les conditions des personnes déplacées et des réfugiés, dont la plupart restent dans des camps, sont extrêmement difficiles et nombre d’entre eux n’ont pratiquement pas accès à l’aide humanitaire. La situation en RCA est d’autant plus difficile que les ONG subissent également des attaques et doivent quitter des régions pour se rapatrier dans la capitale.