Une étude macroéconomique, publiée dans Science Advances le 20 juin 2018 évalue l’impact de l’immigration sur l’économie et la fiscalité, à partir de données annuelles de 15 pays d’Europe (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Irlande, Islande, Italie, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni et Suède, qui totalisent 89% des demandes d’asile en 2015).

Cette étude (publiée en anglais) porte sur une période trente ans, allant de 1985 à 2015, et concerne la majorité des pays d’Europe de l’Ouest. Les auteurs ont analysé l’effet de l’immigration sur la performance économique des pays, mesurée avec le produit intérieur brut (PIB) par habitant, le taux de chômage et le solde des finances publiques. Ils ont comparé deux modèles économiques – l’un comprenant des variables liées à la migration, l’autre sans - et ont observé comment leur économie répondait aux chocs de relance, avec l’intervention du multiplicateur Keynésien (indicateur économique qui permet de quantifier l’effet d’une hausse des dépenses sur le PIB). Les buts de cette recherche étaient d’analyser les effets de la hausse des flux migratoires sur les agrégats macroéconomiques, ainsi que sur les finances publiques (ce qui n’avait jamais été étudié auparavant).

Cette étude révèle que les flux migratoires ont eu un effet positif sur l’économie des 15 pays étudiés, de 1985 à 2015. Toutefois, une distinction est faite entre les flux migratoires, les flux de migrants permanents (qui ont beaucoup augmenté suite à l’élargissement de l’Union européenne aux pays de l’est) et les flux de demandeurs d’asile (qui ont fortement augmenté suite aux guerres dans les Balkans  dans les années 1990 et à la suite du printemps arabe).

Ainsi, suite à augmentation du flux de migrants permanents à un instant t, une augmentation significative et sur 4 ans du PIB par habitant a été constatée, ainsi qu’une baisse du taux de chômage. Des effets bénéfiques sur les finances publiques ont également été relevés, puisque la hausse des dépenses publiques a été accompagnée d’une hausse des recettes.

S’agissant du flux de demandeurs d’asile en revanche, leur contribution économique est plus faible que celle des migrants permanents. En effet et dans la plupart des pays, une prise en charge est proposée tout au long de l’instruction des demandes, tandis que les personnes n’ont généralement pas l’autorisation de travailler. Aucune preuve statistique ne permet de déterminer le coût significatif de l’accueil des demandeurs d’asile sur la période étudiée, au regard des indicateurs utilisés par les chercheurs (niveau de vie, chômage et solde des finances publiques). Cependant, de 3 à 7 ans après un afflux de demandeurs d’asile, des effets significatifs sur le PIB sont observés. En effet, les demandeurs d’asile autorisés à rester contribuent à l’économie du pays d’accueil en travaillant.

Si les chercheurs ne disposent pas de données temporelles suffisantes pour analyser les effets des flux migratoires sur les finances publiques d’un pays particulier - les résultats obtenus dans cette étude sont valides en moyenne pour ces pays -, une étude déjà réalisée en 2016 révélait les effets bénéfiques de l’immigration familiale sur l’économie. En effet, selon cette étude, les personnes issues de l’immigration familiale sont particulièrement présentes sur le marché des services domestiques et des services à la personne. De plus, la réunification des familles réduit les transferts d’argent vers le pays d’origine et accroît les dépenses de consommation en France.

De façon générale, cette analyse a permis de démontrer que la présence de migrants (permanents ou demandeurs d’asile) n’a pas d’impact négatif sur l’économie. Les auteurs de cette étude appellent donc à recentrer le débat sur l’immigration, afin que celui-ci ne se concentre plus uniquement sur le supposé « coût économique » des migrants mais qu’il soit replacé dans sa dimension politique.