D’après l’agence européenne Eurostat, la France a adressé en 2022 plus de 46 000 requêtes à d’autres États européens en vue d’un transfert de demandeurs d’asile qui pourraient relever de leur responsabilité au titre du règlement Dublin. Cependant, seuls 3 300 transferts ont effectivement été mis en œuvre soit un taux de 7%, interrogeant à nouveau la pertinence de ce dispositif.

 

En France, les préfectures ont placé 36 891 personnes sous procédure Dublin lors de l’enregistrement de leur demande d’asile en 2022, soit 24% de l’ensemble des demandes (contre 25% en 2021). Les autorités ont ainsi considéré que ces demandes ne relevaient pas de la responsabilité de la France au titre des critères du règlement dit « Dublin III », dont la dernière version date de 2013. Ces critères reviennent généralement à faire porter la responsabilité de la demande d’asile sur l’État dans lequel les personnes ont été identifiées ou enregistrées en premier lors de leur arrivée en Europe.

De con côté, l’agence européenne Eurostat – dont les données sont fournies par les autorités nationales – comptabilise 46 488 requêtes adressées en 2022 par la France à d’autres États européens (+24% par rapport à 2021), dont 26 736 ont donné lieu à un accord. Sur l’ensemble de l’année 2022, seulement 3 311 transferts ont effectivement été mis en œuvre : le taux de transfert au regard du nombre de requêtes est donc de 7,1%, au plus bas depuis 2017. Si l’on rapporte les transferts aux accords donnés par les États requis, le taux est de 12,4% : il était prévu d’après les documents annexés au projet de loi de finances d’atteindre 20% en 2022, objectif renouvelé pour 2023.

La France a principalement mis en œuvre des transferts vers l’Allemagne (933 transferts, qui représentent 28% du total des transferts Dublin depuis la France), l’Espagne (841 / 25%) et l’Italie (745 / 23%), ces trois pays représentant ainsi plus des trois quarts des transferts.

Le même constat se répète ainsi année après année : pour plus de 9 personnes sur 10 placées sous procédure Dublin, l’application du règlement mobilise des moyens considérables et les place dans des situations d’attente et de précarité prolongées, pour n’aboutir qu’à un report de leur demande d’asile, dont la France redevient finalement responsable. En 2022, les préfectures ont ainsi enregistré 17 793 demandes d’asile relevant de procédure Dublin « éteintes » (dont 7 356 enregistrées en 2002 et « éteintes » cette même année, et 10 437 enregistrées les années précédentes et enregistrées en 2022). Le manque de données publiques ne permet toujours pas d’analyser en détail les raisons multiples ayant entraîné ces requalifications (refus des États requis, annulations de décisions de transfert par les tribunaux administratifs, « fuite » des demandeurs d’asile, clause de souveraineté etc.), pour lesquelles les démarches en préfecture sont parfois longues et complexes.

Parallèlement, la France a accueilli 1 453 demandeurs d’asile transférés sur son territoire au titre du règlement Dublin. Les principaux pays de provenance des personnes transférées au titre du règlement Dublin vers la France sont l’Allemagne (618 transferts, qui représentent 43% du total des transferts Dublin vers la France), la Suisse (210 / 14%) et les Pays-Bas (146 / 10%). Les modalités d’accueil et d’accès à la demande d’asile des personnes « Dublinées » vers la France demeurent peu documentées.